«J’ai vécu un holocauste», déclare l’otage franco-israélienne de 21 ans Mia Shem libérée du Hamas le 30 novembre 2023
La jeune a accordé deux interviews aux chaînes de télévision privée israéliennes 12 et 13, le vendredi 29 décembre. Libérée après cinquante-cinq jours de détention à Gaza, l’ancienne otage franco-israélienne Mai Shem,21 ans, est sortie du silence le vendredi 29 décembre. Elle a accordé deux interviews aux chaînes de télévision privées 12 et 13, (…) retransmises simultanément dans la soirée en Israël. Un autre reportage photo la suivant depuis sa remise en liberté devait être publié dans le quotidien Yediot Aharonot.
Les témoignages des anciens otages du Hamas commencent à s’accumuler dans la presse israélienne mais celui de Mia Shem se démarque déjà, en partie à cause de l’image de la jeune femme, dont une vidéo avait été la première preuve de vie d’un otage israélien dans l’enclave israélienne. Depuis sa libération, elle a acquis une forme de célébrité triste sur les réseaux sociaux. C’est aussi la valeur choc de ses propos, déjà vivement relayés dans les bandes annonces, matraquées depuis jeudi.
Mia Shem raconte son calvaire, depuis le moment où elle a été enlevée le 7 octobre sur le site du festival Tribe of Nova. Comment un homme du Hamas lui a tiré dessus à bout portant dans le bras droit, lui faisant croire qu’elle avait perdu le membre. Et puis son arrivée dans la bande de Gaza, le traitement médical sommaire, les mots du docteur. «Il m’a dit que je ne sortirais pas vivante», raconte Mia Shem.
Assise face à la journaliste, encore en convalescence, son bras pris dans un plâtre, et souvent au bord des larmes, elle détaille les conditions de sa détention, dans la maison privée d’un de ses ravisseurs. Elle relate l’impossibilité de dormir, à cause de la présence constante de son garde, assis vingt-quatre heures sur vingt-quatre en face d’elle. «Il me violait du regard», dit Mia Shem. Elle ne doit son salut, selon elle, qu’à la présence de l’épouse et des enfants de son geôlier dans la chambre d’à côté.
Au fil des jours, elle aurait commencé à comprendre les conversations en arabe, langue cousine de son hébreu, de cette famille normale. Elle parle, presque en souriant, de la jalousie de la femme de son gardien, qui cherchait à l’humilier. «Elle lui disait que mes cheveux étaient faux, elle lui apportait à manger à lui, mais pas à moi, pendant un, deux, trois jours», raconte encore Mia Shem, en triturant ses mèches.
Un pays toujours abasourdi
Dans la presse israélienne, et par vases communicants, dans la presse internationale, deux phrases chocs font les gros titres : «J’ai vécu un holocauste» et «tout le monde là-bas est terroriste». Les deux font mouche auprès d’un public israélien encore abasourdi et trauatisé par les attaques du 7 octobre. (ndlr : mais dans le monde aussi, cela a ravivé le souvenir des femmes israéliennes « violées et démembréses par le Hamas », comme l’a dit une députée française à l’Assemblée Nationale, du coup, les Etats-Unis ont livré des munitions à Israël)
Dès jeudi après-midi, l’ambassade d’Israël en France a relayé la vidéo sur X (anciennement Twitter), reprenant la phrase «tout le monde là-bas est terroriste». Comme si les guillemets, d’un même coup, dédouanaient la délégation diplomatique de la responsabilité de ces propos, et les justifiaient, alors qu’Israël est de plus en plus décrié à travers le monde pour sa riposte militaire massive qui aurait fait plus de 20 000 morts à Gaza (ndlr : selon les chiffres invérifiables du Hamas que les médias internationaux reprennent en boucle). En extrapolant le supplice d’une jeune fille de 21 ans à tout un peuple, on lui fait dire ce que beaucoup d’Israéliens pensent plus ou moins bas : qu’il n’y a pas d’innocents parmi les deux millions d’habitants de l’enclave palestinienne.
(Article de Nicolas Rougier, correspondant à Tel-Aviv du quotidien de gauche français Libération, publié le matin du 29/12/2023)
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